Quatre écrans, une urgence
Jusqu’au 7 septembre, le MACAAL présente cette installation à quatre canaux née en réponse à la sécheresse dramatique de l’été 2022 au Maroc. Le projet prolonge les recherches du duo austro-allemand sur le paysage et le changement climatique, après leur précédente œuvre The Moist Cabinet réalisée en Allemagne en 2021.
Cette fois, les artistes déplacent leur regard vers le jardin Anima de Marrakech, cette oasis artificielle créée par André Heller. Sous le commissariat de Stella Reinhold-Rudas, l’exposition explore les mécanismes cachés qui permettent de maintenir un tel écrin de verdure dans un contexte de stress hydrique.

La parole aux jardiniers
L’installation donne la voix à ceux qu’on entend rarement : Mohamed Ait Tiguert, Mustapha El Barde, Aziz Ait Mtai et Abdellatif Chagour, les jardiniers et techniciens d’Anima. Ils s’expriment en darija et en amazighe sur leurs gestes quotidiens, leurs outils, leurs motivations. Leurs témoignages révèlent le jardin sous un autre angle : celui des infrastructures cachées, des systèmes d’irrigation sophistiqués, des enjeux de maintenance.
Le film capture cette tension entre beauté apparente et réalités techniques, entre l’image de carte postale et les défis concrets de l’entretien. Surtout quand l’oued Ourika, source principale d’eau du jardin, s’assèche complètement.

Jardins et rapports de force
Au-delà de l’esthétique, The Water Cabinet questionne les dynamiques de pouvoir autour de l’accès à l’eau. Qui peut se permettre de creuser des puits profonds ? Qui dispose des ressources pour maintenir un jardin luxuriant en pleine sécheresse ? L’œuvre joue sur ces contrastes : pétales de rose flottants dans une fontaine face à un lit de rivière desséché.
Les artistes assument pleinement leur position d’observateurs extérieurs et revendiquent leur approche comme une « machine à images » qui explore autant la réalité matérielle des jardins que leurs dimensions symboliques et mythiques.

Une table ronde pour prolonger
L’exposition s’accompagne d’une rencontre entre les artistes, Meriem Berrada (directrice artistique du MACAAL) et Marius Boulesteix, paysagiste spécialisé dans les jardins résilients et sobres en entretien. L’occasion d’approfondir ces questions d’écologie, de gestion des ressources et de fiction climatique dans le contexte marocain.