Le Palais Rhoul, conçu tout en
longueur et sur deux niveaux, s’étire le long du lagon.Sa faça de
minérale,aux lignes cubiques et
épurées, s’intègre parfaitement
dans l’environnement.
Un hôtel face à la mer, c’était un rêve d’enfant pour Fanny Rhoul. Après la palmeraie de Marrakech, où elle dirigeait avec son mari le célèbre Palais Rhoul, le temps était venu de prendre le large. Le couple part alors prospecter du côté de Dakhla. Le lieu s’impose à Fanny au détour de son footing matinal. Alors qu’elle court le long de la corniche, son regard est attiré par des viviers de langoustes et homards. La curiosité la pousse à ouvrir la porte de l’entrepôt frigorifique : « Je me suis retrouvée face au lagon, la vue était féérique. J’ai tout de suite su que le Palais Rhoul serait là et nulle part ailleurs ». Avec un peu d’audace et beaucoup de ténacité, elle contacte les propriétaires et parvient à racheter ce terrain situé en plein centre de Dakhla.
Le plâtre excisé, détourné de son usage traditionnel, recouvre des pans entiers de mur, agissant à la façon d’un papier peint.
A l’image de sa situation entre désert et océan, le Palais Rhoul Dakhla est un lieu de contrastes. Ses façades brutes et minérales, aux lignes pures et cubiques, tranchent avec l’intérieur raffiné qui reprend le vocabulaire de l’architecture arabo-andalouse. Le point commun entre les deux, c’est une ouverture totale sur l’océan, grâce à de larges baies vitrées. Les terrasses ont été dotées de garde-corps en verre afin de ne créer aucune interférence entre le regard et l’azur qui se déploie à l’infini. La pierre naturelle qui compose le mur d’enceinte prolonge les rochers du rivage. Cette connexion à l’environnement et le parti-pris moderne de la construction n’enlèvent rien à l’impression de se trouver dans un authentique palais. On le doit notamment à la dominante de couleurs sombres qui recrée l’intimité et la pénombre des demeures ancestrales. Une impression renforcée par les majestueuses portes anciennes en bois placées à l’entrée de certaines chambres, ainsi que l’omniprésence de piliers, arcades et matériaux traditionnels marocains : bejmat, zelliges, tadelakt… souvent détournés de leur usage initial. Comme la couleur kaki peu commune de certains murs en tadelakt. Ou le plâtre excisé, habituellement destinées aux plafonds, qui recouvre ici des pans de murs entiers et fonctionne à la façon d’un papier peint.
Ainsi revisitée, la tradition se marie à des matériaux plus modernes comme le granito ou le béton poli des sols. Les styles et les époques se mêlent également dans le mobilier. D’imposants bancs et tables en bois massif côtoient des fauteuils scandinaves des années 50. Tous ont été créés dans l’atelier marrakchi de Fanny, baptisé « Mon univers », à l’instar des autres meubles de l’hôtel. Quant au objets et toiles de maître qui peuplent l’hôtel, ils ont été collectionnés au gré des voyages de Fanny qui arpente les salles de ventes du monde entier : « J’ai rassemblé tout ce que j’aimais ».
Au départ, aucun architecte ne voulait suivre cette créatrice (la mode est son premier métier) qui fonctionne au coup de cœur. Il faut dire qu’elle n’avait pas l’intention de suivre un plan conventionnel : impossible pour elle, par exemple, de positionner les salles de bain et les toilettes en enfilade, afin de les placer sur la même ligne d’évacuation. C’est finalement un architecte brésilien installé aux Etats-Unis (« aussi fou que moi », s’amuse-t-elle) qui l’a aidée à doter chacune des onze chambres et suites de ses propres volumes. Si la disposition, le style et les couleurs varient complètement de l’une à l’autre, elles répondent toutes au même impératif : offrir une vue imprenable sur l’océan. Y compris depuis la salle de bains, on l’on peut prendre sa douche en observant un banc de dauphins.
De son propre aveu, Fanny voulait « un hôtel anti-conformiste ». Il n’y a pas de téléphone dans les chambres et les réservations se font uniquement par mail. Se déconnecter des machines, se reconnecter à l’humain, tel pourrait être le mantra de cet hôtel qui n’a pas pas de réception et dont le personnel ne porte pas de badge. On prend vite ses habitudes dans ce coin de paradis « sans chichis » précise Fanny qui résume : « On vient chez nous quand on n’a plus rien à prouver ».
Une vaste paillotte face à l’océan
accueille les petits-déjeuners et
les dîners au coin du feu.